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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/232

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1749 — MONSIEUR NICOLAS

tion. Cependant l’absence d’Huet, qui était allé à Auxerre, enseigner aux Écoles Saint-Charles, lui laissait plus de temps…

À son arrivée, le curé, me voyant occupé comme à l’ordinaire, en témoigna son étonnement à son frère. Je ne sais pas ce que celui-ci lui répondit : mais dés ce jour, on m’enleva mes dictionnaires et tous mes livres. Je gardai le silence, mais je me trouvai dans une sorte d’anéantissement. Je n’osai plus, à l’église, lever les yeux sur Jeannette. Je me communiquai moins ; je devins plus concentré, plus sauvage ; rien ne me rassurait plus ; je n’avais plus rien qui m’élevât l’âme : on m’empêchait d’étudier !… Je désirais quitter Courgis, et toutes les circonstances semblaient m’en éloigner. Marguerite ne revenait pas : elle était sans doute accouchée heureusement, puisqu’elle se portait bien ; je l’avais entendu dire ; mais je n’en avais pas de nouvelles particulières ; j’ignorais le sexe de l’enfant, sa vie ou sa ; mort. Je n’ai su tout cela que longtemps après ! c’était une fille… Pour achever de m’accabler, et m’engager à m’abandonner moi-même à l’ignorance, comme on m’y abandonnait, le curé me dit : « Vous croyez avoir de l’esprit ; vous n’avez que quelques bluettes d’imagination, et rien de solide. » (Il se trompait : avec une éducation différente, je serais devenu un physicien profond.) Mais alors je le crus bonnement ; et ce fut mon plus grand malheur, que de l’avoir cru !… Ô mon Lecteur ! n’abattez jamais le courage de vos enfants !… Je crus le curé de