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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/68

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gny en écartait quelques-uns. Mais l’abbé Thomas, loin d’achever de les dérober, faisait gloire au contraire de ses sentiments, que ses livres indiquaient : il appelait cela rendre témoignage à la vérité. Bonnefoi vit d’abord l’Histoire de Rollin, qu’il loua fort. Mais étant enfin tombé sur les livres de controverse, il dit fort sagement à notre maître, que ces livres ne devaient pas être dans une bibliothèque d’enfants. — « On ne peut trop tôt connaître la vérité ! » répondit l’abbé Thomas. Le recteur prit la parole : — « Simple clerc tonsuré, vous voulez nous apprendre à connaître la religion ? » Silence de la part de notre maître. Bonnefoi lui dit : — « Vos sentiments sont à vous ; prétendre vous en faire changer, autrement que par la persuasion, serait une injustice, une tyrannie ; mais le premier pasteur, ou ses délégués doivent vous empêcher de les inculquer à vos élèves. » De livres en livres, Bonnefoi tomba enfin au Nouveau Testament de Quesnel, dont les explications mystiques, creuses quelquefois, mais toujours approfondies avec la pénétration Janséniste, ne m’ont jamais plu ; quoique Messire Antoine Fondriat le lût en Carême dans l’église, à la prière du soir. — « Pour celui-ci, » dit Bonnefoi, « c’est aller contre le jugement spécial de l’église ! — Qu’est-ce ? » dit le recteur. Et il lut le titre. Puis donnant une marque d’horreur, il le jeta par terre. L’abbé Thomas allait le ramasser : Bonnefoi le prévint ; agenouillé, il baisa la place ; et, s’adressant au recteur, il lui dit, d’un ton pénétré : — « Son-