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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 15.djvu/653

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Et comment douterait-on de ce résultat, quand on voit qu’aujourd’hui même nos industriels parviennent à neutraliser, par rapport à la masse des produits qu’ils exportent, tant de désavantages réunis ? Il n’y a donc qu’un seul obstacle sérieux à la prospérité de nos manufactures : c’est l’existence de ce même régime restrictif qu’on prétend nécessaire à leur salut.

Au fond, le procédé du système restrictif, tel qu’on l’applique en France, est assez simple. Il consiste, comme en l’a vu, à favoriser tour à tour chaque industrie particulière aux dépens de la masse : de là résultent à la fois des privilèges et des charges, privilèges particuliers, charges générales ou communes C’est une sorte de cercle vicieux. Certes, s’il était possible de faire pour chacun la balance exacte des bénéfices et des charges qui forment son partage, on trouverait qu’en général le poids de ces dernières l’emporte de beaucoup ; car enfin toute cette combinaison artificielle entraîne un mauvais emploi du capital et du travail de la nation, ce qui implique une destruction de la fortune publique. Malheureusement la plupart des industriels, touchés des privilèges particuliers dont ils jouissent et dont ils mesurent facilement l’étendue, oublient les sacrifices au prix desquels il les achètent. Ce qu’il y a de plus terrible, c’est qu’une fois engagé dans ce cercle fatal il devient difficile d’en sortir sans déterminer quelques désastres. Du moins est-il vrai que, pour en sortir sans violentes perturbations, il faut se garder de vouloir, comme on l’a fait trop souvent, opérer la réforme en s’attaquant tour à tour à chaque industrie isolément, et qu’il faut, au contraire, procéder par des mesures d’ensemble qui tendent à dégrever à la fois tout un ordre de produits. Il est certain pourtant que, par des raisons particulières, si l’on veut que le retour à la liberté s’effectue sans trouble, c’est par les produits agricoles, au nombre desquels nous comptons les produits des mines, qu’il faudra commencer.


CHARLES COQUELIN