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Page:Revue des Deux Mondes - 1847 - tome 18.djvu/811

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du monde : quoique bâtie sur une colline à pentes rapides, la ville occupe, par rapport aux hautes montagnes qui l’environnent, le fond d’un amphithéâtre ; les crêtes neigeuses des Alpes bornent l’horizon au-delà de la vallée du Var ; un pays magnifiquement accidenté descend jusqu’à la mer et se découpe sur les golfes de Nice, de Jouan, de la Napoule ; cet ensemble est inondé de cette lumière éclatante et du reflet de ce ciel azuré que l’on ne connaît plus à quelques lieues des bords de la Méditerranée.

La route royale, n° 85, conduit de Grasse à Antibes ; le château ruiné de Mouans, que le voyageur rencontre à une lieue, est celui où Suzanne de Villeneuve soutint, en 1624, à la tête des paysans des environs, un long siège contre les troupes piémontaises.

Du cap de la Garoupe à la hauteur de l’embouchure du Var, la côte est exposée à l’est. Sur cette longueur de trois lieues, elle ne présente que deux échancrures : l’une est défendue au sud par le monticule de Notre-Dame d’Antibes, et l’on peut y mouiller quand la force du mistral empêche d’entrer dans le port ; l’autre est une petite baie circulaire de 600 mètres de diamètre, en partie défendue à l’est par des îlots rocheux, et abritée des trois autres points de l’horizon par des terres assez élevées. La ville d’Antibes est bâtie entre ces deux enfoncemens. Henri IV en avait laissé les fortifications inachevées ; à la guerre de 1635, elles étaient en mauvais état, et la principale défense de la place consistait dans le Fort-Carré, situé sur un mamelon isolé qui ferme la baie du côté du nord. Vauban acheva, en le perfectionnant beaucoup, ce qu’Henri IV avait commencé ; il exécuta de plus le projet, conçu sous le cardinal de Richelieu, de réunir par un môle les îlots du port à la côte. Ce môle a 470 mètres, est garni au milieu d’une batterie avancée et à l’extrémité d’une tour à fanal. Un autre môle, plus moderne et parallèle au premier, préserve par les vents d’est les navires du ressac de la baie. Le port est ainsi réduit à 4 hectares 20 ; il suffit à un commerce auquel le peu d’étendue du pays desservi assigne d’assez étroites limites. La vigne, le figuier, l’olivier, plus productif ici que sur aucun autre point de la côte, sont les principaux objets de la culture du territoire d’Antibes, qui fournit en outre à la navigation des pierres de taille, des matériaux, des terres à ouvrer, des poteries, et, sur un mouvement annuel d’environ 20,000 tonneaux, les exportations l’emportent d’un tiers sur les importations. La ville a dès long-temps atteint le rang auquel elle se maintient : H. de Séguiran y trouva 5,500 habitans en 1633 ; y compris la garnison, elle en compte aujourd’hui 5,976.

Depuis que Vauban a fortifié Antibes, le Var a plusieurs fois été passé, soit par des armées françaises, soit par des armées ennemies, et ces passages ont presque tous été de grands événemens politiques. A la distance où la place est du Var, elle n’a joué de rôle essentiel dans aucune de