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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXI, 1891.djvu/243

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j. delbœuf. — pourquoi mourons-nous ?

En résumé, les faits nous montrent que la division propagatrice a besoin de préparation, que l’individu divisible doit avoir atteint une certaine maturité, et que la division doit se faire d’une certaine manière pour que les parties vivent et se complètent. Les fragments d’une trop jeune pomme de terre ou ceux qui ne contiendraient pas d’œil, mis en terre, ne germeront pas.

On peut supposer — comme je l’ai déjà indiqué dans mon étude sur Le sommeil et les rêves[1] — que la bipartition se fait dans une

    vant mon habitude, je ramenais l’hétérogénéité à sa plus simple expression : je prenais comme image une sphère de cuivre dont la partie centrale était remplacée par une sphère de zinc. Un pareil système, soumis à des changements de température, éprouvait des tiraillements, était le siège de résistances ou d’entraînements sui generis qui ne se présentaient pas dans une sphère homogène. Procédant ensuite à la façon de Condillac, j’animais cette cellule et j’en faisais la psychologie. Je n’ai gardé de toute cette philosophie métallique que la partie que j’ai insérée dans ma Théorie générale de la sensibililé (Liège, Desoer) et reproduite dans mes Éléments de psychophysique générale et spéciale (Paris, Alcan) ; seulement la sphère sensible que j’introduis pour le besoin de mes démonstrations n’a plus son noyau.

    Puisque je viens de faire une confidence, j’en ferai du même coup une autre qui se rattache incidemment à mon sujet. En ce temps-là j’avais aussi dirigé mes réflexions sur l’immobilité des spores, graines, organismes enkystés. Pour moi, cette immobilité n’est qu’apparente quoique aucun instrument peut-être n’y décèlerait du mouvement. Un appareil de physique pourrait réaliser une immobilité qui ne serait que dans l’apparence. Une colonne d’eau cylindrique et verticale dont on maintiendrait les extrémités à des températures constantes, l’inférieure plus élevée que la supérieure, serait le siège de courants continus, et pourtant la composition de chaque tranche horizontale resterait indéfiniment identique à elle-même. Qui dit qu’il n’y a pas de semblables courants de l’extérieur vers l’intérieur et réciproquement dans les organismes à l’état de sommeil ou de repos ?

  1. C’est dans la livraison de février 1880, p. 167, que j’écrivais les lignes que je vais reproduire ici (voir le volume, p. 171 et suivantes) : « Pour comprendre la formation du germe, nous devons réduire le phénomène de la génération à sa plus simple expression, et le considérer dans son mode primitif, la fissiparité… Or, comment se fait la multiplication par fissiparité ? L’organisme, arriva à un certain point de maturité, se divise en deux moitiés, dont chacune, au bout de quelque temps, reproduit la figure maternelle. Nous ignorons à quelle cause il faut attribuer la division de l’organisme générateur… Nous devinons seulement qu’un certain travail préparatoire est nécessaire, puisque cette division ne se fait spontanément qu’après que l’organisme a atteint un certain degré de développement. Nous ignorons aussi pourquoi chaque figure arrive à reproduire la figure du tout. Pourtant — le fait de la multiplication étant admis — nous concevons sans peine que la division d’un tout, pris dans une phase homogène — je souligne le mot avec intention — donne des parties semblables en figure à ce tout, et que, grâce à la nutrition, elles finissent par l’égaler en dimension et se diviser à leur tour.

    « À côté de ce mode si simple de propagation, il s’en est introduit un autre qui réclame le concours de deux individus. Au premier abord, il semble qu’il n’y ait rien de commun entre la sexualité et la fissiparité. Une réflexion assez naturelle peut combler l’abîme.

    « Chaque moitié d’un organisme inférieur qui se multiplie par division, doit, en dernière analyse, se compléter, et se compléter par une moitié différente