Aller au contenu

Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/184

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
162
Histoire

qu’il avoit entre ses genoux, & leva la voix pour appeler ses trois hommes, avec ordre de faire feu sur tout ce qui s’opposeroit à son passage. Je lui dis que mes gens étoient aussi-bien armés que les siens ; qu’ils m’obéiroient au premier signe, & que je ne lui conseillois pas de me mettre dans la nécessité de le donner. Ensuite m’adressant à la jeune Dame, je lui demandai si elle étoit résolue de se mettre sous ma protection ? Oh ! Monsieur ! me dit-elle, j’implore votre bonté comme celle du Ciel.

Je ne balançai plus à ouvrir la portiére. Sir Hargrave prit ce moment pour m’allonger un grand coup, accompagné de plusieurs injures. J’en avois eu quelque défiance ; de sorte qu’étant sur mes gardes, je n’eus pas de peine à détourner son épée, qui ne laissa point de me toucher légérement l’épaule ; j’avois la mienne à la main, mais dans le fourreau. La portiére demeurant ouverte, il est vrai que je n’eus pas la politesse de baisser la botte du carrosse, pour aider Sir Hargrave à descendre. Je le saisis au collet, avant qu’il eût pu se remettre du coup qu’il m’avoit porté ; & par une violente secousse, qui le fit tourner en tombant de sa voiture, je le plaçai assez heureusement sous la roue de derriere. Je lui arrachai son épée, que je rompis aussitôt, & dont je jettai les deux piéces par-dessus ma tête. Son Cocher jeta un grand cri ; mais il fut arrêté par les menaces du mien.