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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/209

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du Chev. Grandisson.

un baiser. Je l’évitai en détournant la tête ; mais je le conjurai encore de ne pas traiter avec indignité une malheureuse fille qu’il avoit si lâchement trahie.

Il me répondit qu’il ne pénétroit pas ma pensée. Je lui demandai s’il étoit capable de joindre l’insulte à la trahison ? Vous avez mauvaise opinion de mes mœurs, me dit-il d’un ton malin. Est-ce donc là, répliquai-je, la voie que vous prenez pour m’en donner une meilleure idée : Hé bien, Mademoiselle, vous éprouverez de ma part une générosité que vous n’avez pas eue pour moi. Vous verrez que je ne pense, ni à l’insulte, ni à la vengeance. Vous avez piqué néanmoins mon orgueil ; mais vous me trouverez homme de bonnes mœurs.

Alors, Sir Hargrave, je vous bénirai du fond du cœur.

Mais vous savez, Mademoiselle, ce qui est nécessaire à présent pour justifier aux yeux du Public la démarche où je me suis engagé. Soyez à moi, Mademoiselle. Soyez à moi par les plus pures voies de l’honneur. Je vous offre ma main. Consentez à devenir Mylady Pollexfen. Que tous les ressentimens disparoissent, ou… ne reprochez les peines qu’à vous-même.

Quoi, Monsieur ! votre indigne démarche vous paroît justifiée par des offres de cette nature ? Prenez ma vie, que je n’ai pas le pouvoir de défendre ; mais mon cœur & ma main sont à moi. Jamais l’un ne sera séparé de l’autre.