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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/211

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du Chev. Grandisson.

que sa Maison & ses Filles fussent respectées ; & se tournant vers moi, elle me garantit que je ne sortirois de chez elle, qu’avec la qualité de Femme légitime de Sir Hargrave Pollexfen. Il jura qu’il n’avoit pas d’autre vue.

Mais, ma chere, j’ai bien d’autres récits à vous faire ! Mes représentations & mes larmes furent peu écoutées. Cependant je ne cessois pas de joindre les mains avec de nouvelles instances ; lorsqu’une des filles est venue avertir mon Tyran, qu’on attendoit ses ordres à la porte. Ô Dieu ! dis-je en moi-même, de quoi suis-je menacée ! Et dans le même instant je vis entrer un Ministre, de la plus horrible physionomie que j’aie jamais vue, avec un Livre à la main, que je reconnus pour un Rituel, & qui étoit ouvert au feuillet du mariage. Affreux spectacle ! Je m’élançai vers lui, en poussant d’un côté Sir Hargrave, & de l’autre Madame Auberry, que le choc de mon coude fit chanceler. Je me jettai à ses pieds ; Homme de Dieu ! lui dis-je, les mains jointes & levées vers le Ciel ; ame noble & vertueuse ! car toutes ces qualités sont celles d’un digne Ecclésiastique ; si vous avez jamais eu des Enfans, des Nieces, sauvez une malheureuse fille, qu’on a lâchement enlevée à ses Parens, une fille innocente, qui n’a jamais fait de mal à personne, qui chérit tout le monde, & qui ne voudroit pas avoir causé le moindre chagrin ; sauvez-moi