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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/400

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Histoire

qu’elles me prouvent que votre amour tombe moins sur les dehors que sur les qualités de l’ame. J’étois persuadée que si vous aimiez jamais, votre passion seroit de l’ordre le plus pur. N’étant pas fondée sur les sens, ne souffrez donc pas qu’elle triomphe de votre raison, & que l’impossibilité d’obtenir l’homme que vous aimez, ne vous fasse pas renoncer à tous les autres hommes. Ne vous ai-je point enseigné que le mariage est un devoir, lorsqu’on y entre avec prudence ? Quelle opinion faut-il prendre, dans l’un ou l’autre sexe, de ceux qui ont de l’aversion pour cet état, parce qu’il a ses peines, ses fatigues & ses inconvéniens ? Mettez Sir Charles à l’épreuve par cette regle. Si ce sont ces motifs qui le dégoûtent du mariage, regardez-les comme une des grandes imperfections de son caractere. Ne craignez pas de le mettre à l’épreuve. Il n’y a point d’homme absolument parfait.

Mais Sir Charles peut avoir des engagemens qu’il lui est impossible de rompre. Si telle est sa situation, je me flatte que ma Fille ne s’abandonnera point à des sentimens pour lesquels elle ne peut attendre de retour. Vous espérez, disiez-vous agréablement dans une de vos Lettres, que votre ruine ne viendra point d’un homme vertueux. Après le bonheur que vous avez eu d’échapper à Sir Hargrave, je ne crains rien pour vous d’un méchant homme. Mais si votre perte venoit d’un homme de bien, ce seroit votre faute, ma