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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/132

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Histoire

en ai blâmés, & je leur ai dit que la meilleure voie étoit celle de la douceur. Aussi-tôt que vous eûtes quitté Boulogne, ils l’informerent de votre départ. Camille m’a réellement effrayée par le récit qu’elle m’a fait de la rage & du désespoir qui furent le fruit de cette déclaration ; ensuite des accès de silence & la plus profonde mélancolie succéderent aux passions violentes.

Ils se flattoient, à mon arrivée, que ma présence & ma compagnie lui apporteroient quelque soulagement, mais elle fut deux jours entiers sans faire la moindre attention à moi, ni à mes discours. Le troisieme jour, m’étant apperçue qu’elle souffroit impatiemment de n’être pas libre, j’obtins, avec beaucoup de difficulté, que ses mains fussent déliées, & qu’on lui permît de se promener au Jardin avec moi. Ils m’avoient fait connoître qu’ils se défioient de la grande Piece d’eau. Comme nous avions sa femme de chambre avec nous, je ne laissai point de la conduire insensiblement de ce côté-là. Elle s’assit sur un banc, vis-à-vis de la grande Cascade, mais elle ne fit aucun mouvement qui pût m’alarmer. Depuis ce jour elle a pris pour moi plus d’affection que jamais. Lorsque j’eus obtenu sa liberté, le premier usage qu’elle fit de ses bras, fut pour me les jeter autour du cou, en cachant son visage dans mon sein. Je remarquai facilement que c’étoit l’expression de sa reconnoissance, mais elle parut peu disposée à parler. Sa