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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/24

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Histoire

à rendre mes Freres plus tranquilles.

Ce badinage, Mademoiselle, commence à me donner quelque espoir. Continuez dans cette agréable disposition, & le secret touche de lui-même à sa fin. Les recherches deviendront inutiles.

Camille, que vous voyez ici, ne cesse pas de me tourmenter par la folle imagination que j’ai de l’amour. Une jeune personne de mon sexe ne peut être grave & se livrer un peu à la méditation, qu’on ne l’accuse aussi-tôt d’avoir de l’amour. Je me croirois digne de toute ma haine, si j’avois donné à quelque homme au monde le pouvoir de me causer la moindre inquiétude. Je me flatte, Monsieur, je me flatte que vous, qui prenez le nom de mon Frere, vous n’avez pas de votre Sœur une si méprisable idée.

Méprisable ! Je ne conviens point, Mademoiselle, que l’amour mérite du mépris.

Quoi ? lorsqu’il s’égare dans le choix de l’objet ?

Mademoiselle !

Qu’ai-je dit qui vous étonne ? Auriez-vous dessein… Mais je n’ai pensé ici qu’à vous faire connoître que ce n’est pas d’aujourd’hui que je pénetre vos insinuations ; & que le jour, si vous vous en souvenez, où vous me lûtes quatre Vers d’un de vos Poëtes, qui contenoient une peinture si forte de la mélancolie des Amans, je sup-