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LES GRANDES ÉPOQUES CRÉATRICES

tein, née Fürstemberg — une âme du monde, élégante et charmante, aux impressions qui changent, aux sentiments jamais profonds, jamais entiers —rêverie, agitation, caprice ou élégie, ou rieuse gaminerie — le tout à fleur de peau. C’est l’antithèse absolue de la sonate qui suit, de la seconde quasi una fantasia —* 1 le Clair de Lune 1. Dans celle-ci, comme j’ai dit, l’émotion personnelle commande la construction. Il vaut la peine de nous arrêter à l’analyse de cette œuvre unique.

Ici, le sentiment rompt les habituelles liaisons tonales de la mélodie ; l’artiste renonce aux procédés de développement et de renouvellement des motifs, quand l’état psychique se prolonge sous l’empire d’une unique obsession : (premier morceau). Il ne recourt pas à l’artifice des oppositions dialoguées, quand il n’est occupé que de soi seul et de son soliloque emporté : (troisième morceau). Il rejette délibérément la régularité des périodes fixes ; il les coupe brusquement ; il explose, il est en proie à toutes les surprises de la passion.

Et cependant, par un miracle de l’art et du cœur, le sentiment ici se révèle un puissant constructeur. Cette unité que l’artiste ne cherche pas dans les lois architectoniques instants, une âme étrangère. Il faut n’avoir jamais aimé — fût-es d’un regard souriant et libéré — pour n’avoir pas constaté (je m’adresse aux artistes) sur son esprit qui crée, les greffes d’un autre esprit. 1. J’emploie ce nom consacré, sans y attacher d’autre importance que celle d’une association d’image, ou plutôt d’impression, heureusement trouvée, après coup. Reïlstab, le poète de tant de liader de Scbudert, ea lu !) dit-on, l’inventcuï.