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LES GRANDES ÉPOQUES CRÉATRICES

Puis, reprend la sauvage rafale dans la nuit1, mais avec un redoublement de rage pour conclure, un cyclone : arpèges emportés qui se déroulent, des profondeurs aux cimes, convulsions frénétiques...

Et après, comme souvent — comme presque toujours chez Beethoven, le silence. Brusque Adagio... piano... L’homme, à bout de clameurs, se tait, son souffle est coupé. •— Et quand, après un moment, la respiration reprend et que l’homme se relève, c’est fini du vain débat, des sanglots, des fureurs. Ce qui est dit est dit, et l’âme est vidée. Il ne reste plus, dans les dernières mesures, que la Force majestueuse, dominant, maîtrisant, acceptant le torrent. Gigantesque tableau d’àme, qui doit sa réussite, beaucoup plus qu’à la maîtrise de l’artiste, souvent emporté par le flot, à la qualité intrinsèque de cette âme souveraine, qui garde une harmonie et une noblesse naturelle, jusque dans ses convulsions.

Mais cette réussite, due à des circonstances trop exccp- 1. Une autre indication essentielle, que négligent les éditions modernes, est le con sordino, expressément marqué et répété par Beethoven, au-dessous de chacune de ces furieuses galopées, jusqu’aux deux accords qui les font cabrer, et dont le premier est marqué : sforzando, et les doux : senza sordino ;

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