Page:Rolland - Beethoven, 1.djvu/298

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
261
LES GRANDES ÉPOQUES CRÉATRICES

scr le mezzo forte ; et c’est îe point le plus haut de la scène s il exprime comme un transport du génie de la liberté. Alors, Rocco s’étonne du jeune homme qui parle avec lui-même. Puis, le travail reprend, et de nouveau la scène se termine pianissimo.

Mêmes demi-teintes dans le terzetto (Florestan, Leonore* Rocco). Les crescendi vont du piano au piano, en passant par un bref sforzando, presque aussitôt suivi du piano : (sf. p. très caractéristique de Beethoven). La mélodie de pitié, de douleur, de gratitude, y garde toujours sa ligne large, calme, sans romantisme. Le più mosso de la fin1 ne sort pas du piano, et s’éteint encore dans le pianissimo. Voici donc trois grandes scènes (et l’on peut dire : quatre, en comptant le chœur des prisonniers, terminant le premier acte), qui se déroulent dans le clair-obscnr, avec une délicatesse de moyens, une pudeur d’émotion, absolument en désaccord avec l’image emphatique et empanachée, que se font de Beethoven ceux qui ne le connaissent point. Elles ne contredisent pas moins la routine déclamatoire du théâtre d’opéra. Aussi, Berlioz notait-il que le public de son temps en était déconcerté ; à toutes ces conclusions piano, il répondait par un « rigoureux silence ». — Ce silence n’est pas un mal ! Nous ne demandons pas qu’on applaudisse, au théâtre. Nous demandons que le cœur, et non les mains, parle. Je voudrais que tous les musiciens, qui cherchent à pénétrer l’art de Beethoven, eussent sous les yeux, comme moi, telle partition manuscrite de Leonore, corrigée de sa i.i. Leouore : — « O mehr a’is ich crlragen kannl«