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duc, la plupart des artistes : c’était là que le génial Heinrich Schütz était né et était mort[1] ; ce fut là que Hændel trouva son premier appui, et que sa vocation d’enfant fut reconnue.

Les précoces dispositions musicales du petit Georg Friedrich s’étaient heurtées à l’opposition formelle du père[2]. L’honnête chirurgien avait plus que de la défiance — une sorte d’aversion pour la profession d’artiste. Ce sentiment était partagé par presque tous les braves gens de l’Allemagne. Le métier de musicien était discrédité par le spectacle peu édifiant qu’avaient donné certains artistes, dans les années relâchées qui suivirent la guerre de Trente Ans[3]. D’ailleurs, la bourgeoisie allemande du xviie siècle n’avait pas de la musique une idée très différente de celle de notre bourgeoisie française du xixe siècle : c’était pour elle un art d’agrément, non une profession sérieuse. Beaucoup des maîtres d’alors, Schütz, Rosenmüller, Kuhnau, furent

  1. En 1672.
  2. On trouvera partout racontées les anecdotes légendaires sur le petit Hændel, sortant du lit, la nuit, pour aller en cachette jouer d’un petit clavicorde, qui se trouvait au grenier.
  3. Voir la préface que le cantor à la Thomasschule de Leipzig, Tobias Michael, écrivit à la seconde partie de sa Musikalische Seelenlust (1637) ; et, dans la vie de Rosenmüller, le récit de la scandaleuse affaire qui, en 1655, força ce grand musicien à fuir à l’étranger. (August Horneffer : Johann Rosenmüller, 1898.)