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Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/176

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MIRABEAU.

raison continue, le bon sens infatigable, l’abondance des ressources, l’à-propos toujours prêt ; la vie enfin qui anime tout ; la bonne humeur généreuse qui fait tout passer, et cette terrible familiarité qui le mettait partout à son aise et de plain-pied avec tout le monde. « J’ai toujours remarqué, comme la preuve d’un très bon esprit, qu’on fît son métier gaiement. »

Les mots de Mirabeau sont restés plus que ses harangues ; car ce lecteur incomparable, ce raisonneur correct et tenace, n’en était pas moins un merveilleux improvisateur. Si, dans ses discours, il allait ordinairement droit au but, dans ses répliques, il allait toujours droit à l’homme. « Qu’importent les feuilles du soir ! Allons à la question ! » répondait-il à un interrupteur qui le menaçait de la colère des journaux. À l’abbé Maury qui venait de disserter longuement sur les biens du clergé : « Il m’a été difficile de deviner si le préopinant est monté à la tribune pour son plaisir ou pour le nôtre ». Et, comme il soutenait un jour, au milieu des murmures de la gauche, une proposition favorable à la religion : « Je supplie la partie de l’Assemblée qui m’interrompt d’observer que je ne vise pas à un évêché ».

Quoiqu’il se piquât de philosophie et de « métaphysique », jamais homme n’eut moins de goût pour les théories abstraites, et ne fut moins enclin aux utopies. Il estimait que, dans la politique, les occasions, les expédients et le hasard tiennent presque autant de place que les principes : « Autre chose