Aller au contenu

Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/210

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
202
MIRABEAU.

gagner l’Assemblée ou la dissoudre de vive force. Ainsi, un coup d’État, la guerre civile et la dictature : tels étaient, un peu plus d’une année après les premiers enchantements de la liberté, les seuls moyens de salut qu’entrevît, pour la France, « le plus grand génie politique que les temps modernes aient enfanté ». Depuis cent ans, dans notre pays, je ne vois pas qu’on en ait su trouver d’autres.

Que valaient d’ailleurs ces projets ; et faut-il, avec de grands politiques de nos jours, n’y voir que des enfantillages coupables ? Je ne le saurais croire. Entre eux et Mirabeau je n’hésite guère.

Sans doute le départ du Roi n’était qu’un expédient, mais un expédient nécessaire ; et, pour n’avoir pas su partir en plein jour, comme alors il l’aurait pu faire, il a fallu fuir, la nuit, un an après, lorsque, depuis longtemps, il était trop tard. Après les journées d’octobre et tant d’autres, lorsque chaque jour l’émeute de la veille recevait, à la barre de l’Assemblée, des conseils débonnaires ou d’emphatiques éloges ; quand l’anarchie, abattant l’un après l’autre tous les pouvoirs, faisait pousser à leur place, dans chacune des sections de Paris, quelque dictature nouvelle, et lorsque, sous les fenêtres des Tuileries, des milliers de voix demandaient la tête de « l’Autrichienne » sur tous les airs à boire de la saison, fallait-il encore attendre ? Attendre que l’Ami du peuple eût « organisé en bataillon sacré cent jeunes tyrannicides qui devaient, patria jubente, mettre en action un certain droit des gens exercé avec tant