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Page:Roussy - Le cancer fleau social 1921.djvu/10

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culose, et qu’il n’y a que quelques années (1905) que fut mis en évidence par Schaudin le parasite de la syphilis.

Si la cause intime du cancer nous échappe encore, de grands progrès, avons-nous dit, ont été faits en ce qui concerne l’étude expérimentale des tumeurs.

Depuis le siècle dernier, des résultats très intéressants, en effet, ont été tirés de l’observation de la pathologie comparées, c’est-à-dire de l’étude des maladies chez les animaux.

C’est à l’École française que revient le mérite d’avoir montré pour la première fois que le cancer n’était pas une maladie propre à l’homme, mais qu’il existait également dans le série animale.

Cette importante notion à permis à la question du cancer d’entrer, à proprement parler, dans le domaine de l’expérimentation et de devenir une science de laboratoire.

Grâce à elle, on a pu faire ainsi une série de recherches et d’expériences qui ont servi à éclaircir certaines questions très discutées, comme celles de le contagion, de l’hérédité, de la transmission du cancer.


Le cancer chez les animaux. — On sait en effet, aujourd’hui, que la plupart des animaux peuvent être atteints de cancer, les animaux domestiques comme les animaux sauvages. Le chien fait très souvent des tumeurs ; elles sont également fréquentes chez le cheval, le mouton, le porc, les bovidés, etc…

Parmi les animaux atteints de cancer, il en est qui sont extrêmement importants pour nous : ce sont les souris et les rats. La sourie est un animal facile à se procurer et à élever, et qui accomplit rapidement son cycle de vie, en quatre ou cinq ans au maximum. Il est donc aisé, dans les élevages, de laisser vieillir ces animaux et de voir apparaître des tumeurs spontanées que l’on peut ensuite inoculer à d’autres souris et reproduire ainsi à plusieurs générations successives. Dans la plupart des pays, en France, au Danemark, en Angleterre, en Allemagne et en Amérique, — ainsi que j’ai pu m’en rendre compte au cours d’un récent voyage aux États-Unis, — les laboratoires de recherches ont institué des élevages de souris. À Chicago notamment, il existe un vaste chenil (Mouse House) dirigé par Miss Slye, où sont élevés plusieurs milliers de souris (plus de 500.000 en dix ans), et d’où sont sortis une foule de travaux intéressants concernant la contagiosité et l’hérédité du cancer.

Il résulte de ces observations de tumeurs chez les animaux, en particulier chez le rat et la souris, que le cancer est inoculable en série chez la même espèce animale. Le cancer de la souris blanche est transmissible par inoculation à la souris blanche ; mais il n’est pas inoculable à des animaux d’espèces différentes : une tumeur de la souris ne prend pas chez le rat. Bien plus, les greffes de tumeurs échouent lorsque dans une même espèce d’animaux on s’adresse à des races différentes. La tumeur de la souris blanche est pour ainsi dire impossible à greffer sur une souris grise, et la tumeur du rat blanc est également impossible à inoculer au rat gris. Et même, on a remarqué qu’une tumeur provenant d’un élevage étranger et de souris blanches, de Londres ou de Copenhague par exemple, était très difficilement inoculable aux souris de nos laboratoires français.

C’est là un fait important, qui touche au grand problème de la réceptivité du terrain sur lequel évoluent les maladies.

Pendant longtemps, on croyait à tort que le cancer était propre aux ani-