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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/219

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corps de leurs enfans. Ce n’est ni par ton, ni par luxe qu’ils se sont imposés cette loi ; ils ont reconnu le besoin & la nécessité d’y avoir recours, soit pour tenir leur corps propre, soit pour les fortifier & favoriser la transpiration ; les lotions fréquentes nettoient la peau des ordures qui la souillent.

Chaque fois qu’un enfant se salit dans ses langes, on doit le changer aussitôt, & ne pas attendre ce qu’on appelle l’heure du maillot. Rien n’est plus préjudiciable à la santé des enfans, que de les laisser dans l’ordure, sur-tout en été. L’âcreté des matières, leur chaleur, jointe à celle de l’atmosphère, produisent sur leurs membres des rougeurs, des excoriations & des plaies.

Quand les enfans en sont attaqués, bien loin de recourir à l’application des remèdes dessiccatifs, tels que la poudre de bois vermoulu, la céruse, il vaut mieux préférer une méthode plus douce, plus simple & plus efficace, qui consiste à les envelopper dans ses linges chauds bien lessivés, & adoucis en les froissant entre les mains.

Cette méthode n’est pas dangereuse, & est plus conforme aux vues de la nature. Les enfans sont à l’abri des convulsions, des coliques, des accès épileptiques qui arriveroient à coup sûr, si ces excoriations dépendoient de quelque humeur viciée surabondante, qui se seroit ainsi ouvert une route favorisée par l’âcreté des excrémens. Ce fait n’est pas sans exemple : j’ai plusieurs fois observé que de tels accès épileptiques étoient le plus souvent produits par la répercussion de quelque humeur âcre sur les nerfs ; la guérison exige d’avoir recours à l’application des exutoires, afin de donner une issue à cette humeur & faire cesser la maladie.

III. Emmaillotter les enfans est le plus grand préjudice qu’on puisse porter à leur accroissement & au développement de leurs membres. Le célèbre Jean-Jacques, pour le bonheur de l’humanité, a mis cette vérité dans le plus grand jour. Le maillot est à l’enfant, ce que les ligatures sont à l’arbre ; si on le lie fortement, au bout de quelque temps on verra que l’endroit de la ligature a été privé d’une grande portion de sève ; elle s’est fixée tout autour des parties du dessus de la ligature, & les a fait grossir de manière qu’elles forment un bourrelet. Combien d’enfans ont été les victimes du maillot ? Combien n’y en a-t-il pas qui sont difformes, & même bossus pour avoir été, pour ainsi dire, garrottés en venant au monde !

La plupart des sages-femmes de province font consister leur habileté à savoir bien serrer un enfant dans le maillot ; c’est le comble du ridicule & de la cruauté : la belle proportion du corps des enfans ne dépend point du maillot. Parmi les sauvages, voit-on des hommes contrefaits ? connoissent-ils cette pratique abominable ? ils suivent la voix de la nature, qui exclut toute gêne, toute bande, & tout ce qui peut comprimer. Les animaux en fournissent les preuves les plus frappantes ; leurs petits naissent très-délicats, & ne deviennent jamais contrefaits, pour n’avoir pas été emmaillotés.

Le corps du nouveau-né doit exécuter plusieurs fonctions. Une des