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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/261

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tive comme on le prétend, & que c’est la main de l’homme qui la rend alternative par la taille. Nous intervertissons l’ordre de la nature : les oliviers qui ne sont pas taillés, chargent toutes les années si les circonstances leur sont favorables.

On dira peut-être, voyez, examinez un olivier pendant l’époque de sa fleuraison, après qu’il a été taillé ; il donne moins de fleurs, proportion gardée avec les rameaux qu’on lui a laissés, & la majeure partie des fleurs ne noue pas. Ces assertions sont vraies, mais elles portent sur des points qu’on n’a pas assez examinés. Raisonnons par comparaison : 1°. l’expérience a démontré aux jardiniers instruits qu’ils peuvent par la taille changer les bourses, les brindilles & lambourdes, (voyez ces mots) en véritables branches à bois ; il suffit de les rabattre à un œil ou deux tout au plus, mais encore mieux à un seul œil. Or, si ces petits retranchements font effet sur un espalier, quel ne doit donc pas être celui de la soustraction d’une quantité considérable & de branches & de rameaux ? 2°. La même expérience prouve encore que lorsqu’on abat beaucoup de bois ou vieilles branches sur un arbre en espalier ou en buisson, les fleurs ne nouent pas, à moins que la saison ne leur soit très-propice. L’arbre tend à se regarnir de bois, à produire des pousses nouvelles ; la séve est détournée, attirée vers les nouveaux jets avec plus de force que dans les anciennes branches. Ce sont des faits qui n’échappent point aux yeux de ceux qui sont accoutumés à examiner & à réfléchir. Il en est ainsi pour l’olivier, plusieurs boutons qui étoient à fruit se mettent à bois, & les nouveaux bourgeons attirent à eux trop de séve pour que le fruit noue. Telle est la marche ordinaire de la nature, si elle n’est singulièrement favorisée par les saisons. La récolte de 1780 fut dans mes environs aussi brillante sur les arbres en rapport que sur ceux qui avoient été taillés aux mois de mars ou d’avril précédent. Des exemples très-rares ne détruisent pas les principes qu’on vient d’établir. L’olivier est donc forcé par la taille à devenir bienne : si la taille est trienne, son produit sera mixte, ainsi que celui de taille annuelle : c’est ce que l’on examinera ci-après.

3°. L’expérience prouve encore qu’un vieux arbre en espalier ou en buisson, ou même à plein vent, & qui n’a plus la force de pousser de nouveaux jets, soit par vétusté, soit parce qu’il est chargé d’un très-grand nombre de bourses, brindilles, &c., fleurit & fructifie chaque année ; l’olivier qui n’est pas taillé est dans le même cas ; mais souvent la fleur ne noue pas, & le fruit tombe bientôt quoique aoûté, parce que les canaux séveux sont trop oblitérés, & que la séve ne monte pas en quantité proportionnée aux besoins.

4°. Il est rare & très-rare de voir deux grandes récoltes consécutives. Ce phénomène tient-il uniquement aux différentes manières d’être des saisons, ou bien l’arbre est-il trop épuisé par les productions de l’année précédente ? Mais si l’olivier ne donne son fruit que sur les rameaux de l’année précédente, on devroit conclure que les boutons à fruit sont dans le cas de se développer toutes les fois qu’ils sont formés, quelle qu’ait été la production de l’année antérieure. S’ils ne réussissent pas, cela tient à la constitution des saisons.