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Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/19

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XIX
PRÉFACE.

le vent les a enlevés. Ces amis sont de ceux qu’un souffle emporte, et il ventait devant ma porte, etc. »

Mais l’infortune de Rutebeuf ne provenait pas tout entière, il est probable, des causes que nous venons d’indiquer : au fond de sa misère il devait y avoir et il y avait certainement pour cause principale quelque vice personnel. Les paroles suivantes, qu’on trouve dans une de ses pièces, La Griesche d’yver (voyez, t. I, page 27), nous en fournissent la preuve : « Les dés que les détiers ont faits m’ont privé entièrement de ma robe ; les dés me tuent ; les dés me guettent et m’épient ; les dés m’assaillent et me défient, etc. »

Que conclure de ce passage, sinon que Rutebeuf était fortement tourmenté de la passion du jeu ?

Telles sont à peu près les circonstances générales de la vie de notre poëte sur lesquelles ses œuvres nous offrent quelque lumière ; mais, ainsi que nous l’avons dit, on n’y trouve aucun détail touchant ses actions de chaque jour. En revanche, Rutebeuf nous dédommage amplement de ce silence sur ce qui le regarde par de nombreux détails biographiques fort curieux sur divers princes ou grands seigneurs ses contemporains. En plusieurs points même il supplée Joinville, et ses vers nous apprennent beaucoup de choses sur Geoffroi de Sargines, sur Thibaut V, sur le comte de Poitiers, etc. En outre, ses révélations piquantes relativement à plusieurs événements qui eurent lieu à son époque, les mille et une méchan-