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Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/69

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LA MORT RUTEBEUF.

Dont anemis[1] m’a enchanté
Et m’âme mise en orfenté[2]
Por mener à félon repère.
Se cele en qui toz biens resclère
Ne prent en cure mon afère[3],
De male rente m’a renté
Mes cuers, où tant truis de contraire :
Fisicien, n’apoticaire,
Ne me puéent doner santé.

Je sai une fisiciene
Que à Lions, ne à Viane[4],
Ne tant comme li siècles dure,
N’a si bone serurgienne[5].
N’est plaie, tant soit anciene,
Qu’ele ne nétoie et escure
Puis qu’ele i veut metre sa cure.
Ele espurja de vie obscure
La bénéoite Egypciene ;
A Dieu la rendi nete et pure :
Si com c’est voirs, si praingne en cure

  1. Ms. 198 N.-D. Var. Dont aucuns.
  2. Orfenté, état d’un orphelin.
  3. Ms. 7633. Var. M’enfertei.
  4. Le Ms. 7633 donne ici cette version :

    Que à li Car ne à Vienne,
    Non tant com touz li siècles dure, etc.

    Ces deux mots li Car sont probablement une erreur : il faut lire, comme dans notre texte, Lions, pour désigner la ville de Lyon.
  5. Au lieu du mot serurgienne, qui appartient au Ms. 7633, le Ms. 7218 répète le mot fisicienne, ce qui semblerait faire croire qu’on peut regarder les expressions serurgien et fisicien comme synonymes. Il est certain cependant qu’il y eut entre elles une différence. (Voyez sur ce sujet la note B, à la fin du volume.)