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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/151

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s’échappait avec tant de plaisir ; elle s’y repose, tout en nage ; et son premier soin est de se précipiter à genoux, pour offrir à Dieu ses remercîmens, pour lui demander de nouveaux pardons des fautes involontaires qu’elle a commises dans ce réceptacle odieux du crime et de l’infamie. Des larmes amères coulent aussi-tôt de ses beaux yeux. Hélas ! se dit-elle, j’étais bien moins coupable, quand je suivis, l’année dernière, cette même route, guidée par un principe de dévotion si funestement trompé. Oh Dieu ! dans quel état puis-je me contempler maintenant !

Ces funestes réflexions un peu calmées par le plaisir de se voir libre, Justine poursuivit sa route vers Dijon, s’imaginant que ce ne pourrait être que dans cette ville où ses plaintes seraient utilement et légitimement entendues.

Elle était à sa seconde journée ; parfaitement calme sur les craintes qu’elle avait d’être poursuivie, la tête néanmoins remplie de toutes les horreurs dont elle venait d’être à-la-fois et le témoin et la victime ; il faisait chaud, et suivant sa coutume économique, elle s’était écartée du chemin pour trouver un abri où elle pût faire un léger repas qui la mît en état d’attendre le soir ; un petit bouquet de bois