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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/22

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écrivains racontent de la férocité des anciens indigènes de cette isle, me fait croire que je retrouverai quelques traces de leurs vices dans les descendans des Lestrigons, des Cyclopes et des Lotophages,[1]. Vous allez voir si je me trompais, et si les prêtres, les nobles et les riches négocians de cette isle délicieuse n’ont pas tout ce qu’il faut pour nous donner une suffisante idée de la dépravation et de la férocité de leurs ancêtres. Plein de ce projet, je traversai toute l’Italie ; et, à cela près de quelques scènes luxurieuses, de quelques crimes sourds et secrets auxquels je me livrai pour me tenir en haleine, il ne m’arriva rien qui, comparable à ce qui me reste à vous dire, mérite de suspendre ici votre attention.

Je m’embarquai à Naples, au milieu du mois de septembre, sur un joli petit bâtiment marchand qui faisait voile vers Messine, et dans lequel le hasard me fit rencontrer l’occasion d’un crime gratuit, aussi singulier que

  1. Par-tout (dit Bridoine, dans son intéressant voyage de Sicile) où l’air est fortement imprégné d’exhalaisons enflammées, les habitans y sont extrêmement méchans et vicieux.