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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/249

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pratiquer des vertus, qui ne sont que des vices ailleurs, et à fuir des crimes, qui sont d’excellentes actions dans d’autres climats. Je te demande maintenant si tu peux, d’après ces réflexions, conserver encore des remords pour avoir, par plaisir ou par intérêt, commis en France un crime, qui n’est qu’une vertu à la Chine ; si je dois me rendre très-malheureuse… me gêner prodigieusement, afin de pratiquer en France, des actions qui me feraient brûler à Siam. Or, si le remords n’est qu’en raison de la défense ; s’il ne naît que des débris du frein, et nullement de l’action commise, est-ce un mouvement bien sage à laisser subsister en soi ? n’est-il pas absurde de ne pas l’étouffer aussi-tôt qu’on est parvenu à considérer comme indifférente l’action qui vient de donner des remords, qu’on a réussi à la juger telle, par l’étude réfléchie des mœurs et coutumes de toutes les nations de la terre ? Ce travail fait, qu’on renouvelle cette action, telle qu’elle soit, aussi souvent que cela sera possible ; ou mieux encore, qu’on en fasse de plus fortes que celles que l’on combine, afin, de se mieux accoutumer à celle-là. L’habitude et la raison détruiront bientôt les remords : ils s’anéantiront aussi-tôt, ces mouvemens té-