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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/113

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doute qu’il fasse plus d’honneur à mon ame que n’en fit à celle de mon amie le trait que je viens de vous raconter.

J’étais à ma toilette, entourée d’une foule de courtisans qui paraissaient attendre, avec respect, toute leur fortune de moi ; un de mes gens m’annonce un homme de quarante-cinq ans, dans la plus extrême misère, et qui sollicite avec ardeur la grâce de m’entretenir un instant en particulier. Je fais répondre d’abord que je ne suis pas dans l’usage de recevoir de pareils gens, que s’il s’agit de secours ou de recommandations auprès du ministre, on n’a qu’à me présenter un mémoire, et que je verrai ce qu’il sera possible de faire ; l’ardent solliciteur insiste. Plus par curiosité que par aucun autre motif, je dis enfin qu’on fasse entrer dans un petit salon où je donnais communément mes audiences secrètes ; et après avoir ordonné à mes gens de ne point s’éloigner, je vais écouter ce nouveau personnage.

Je me nomme Bernole, madame, me dit l’inconnu, je sais que ce nom doit être ignoré de vous ; il ne le serait pas autant de la mère que vous avez eu le malheur de perdre, et qui, malgré le faste où vous vivez,