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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/200

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une vertu ; pas un défaut ; qui ne soit une beauté ; pas un ridicule, qui ne soit une grace ; eh ! quand l’ivresse est dissipée, et qu’éclairé sur le méprisable objet de son culte, l’homme peut le considérer de sang-froid, ne devrait-il pas au moins, en rougissant de son indigne erreur, prendre de fermes résolutions, pour ne plus s’aveugler à l’avenir ?

L’inconstance et le libertinage, voilà, mes frères, les deux contre-poisons de l’amour ; tous deux, en nous accoutumant au commerce de ces fausses divinités, font insensiblement tomber l’illusion ; on n’adore plus ce qu’on voit tous les jours : par l’habitude de l’inconstance et du libertinage, le cœur perd insensiblement de cette mollesse dangereuse, qui le rend susceptible des impressions de l’amour ; il se blase, il s’endurcit, et la guérison suit de près. Eh ! comment irai-je me morfondre près des rigueurs de cette créature qui me brave, lorsqu’avec un peu de réflexion, je vois qu’un couple de louis peut me procurer, sans peine, la possession d’un corps aussi beau que le sien ? Ne perdons jamais de vue que la femme qui essaie de nous captiver le