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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/337

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voulais pas. Né libertin, impie, débauché, sanguinaire et féroce, je ne parcourus le monde que pour en connaître les vices, et ne les pris que pour les rafiner. Je commençai par la Chine, le Mogol et la Tartarie ; je visitai toute l’Asie : remontant vers le Kamchatka, j’entrai en Amérique par le fameux canal de Bering. Je parcourus cette vaste partie du monde, tour à tour chez les peuples policés et chez les sauvages, ne copiant jamais que les crimes des uns, les vices et les atrocités des autres. Je rapportai dans votre Europe des penchans si dangereux, que je fus condamné à être brûlé en Espagne, rompu en France, pendu en Angleterre, et massolé en Italie, mes richesses me garantirent de tout. Je passai en Afrique ; ce fut-là où je reconnus bien que ce que vous avez la folie de nommer dépravation n’est jamais que l’état naturel de l’homme, et plus souvent encore le résultat du sol où la nature l’a jeté. Ces braves enfans du soleil se moquèrent de moi, quand je voulus leur reprocher la barbarie dont ils usaient avec leurs femmes : et qu’est-ce donc qu’une femme, me répondaient-ils, sinon l’animal domestique que la nature nous donne