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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/371

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semblable. Oui, je le répète ; cette étude bien approfondie, tout plein de crimes qui paraîtraient atroces aux sots, ne nous semblent plus que tout simples : qu’on aille dire aux ames vulgaires que Pierre ayant reçu cent louis de Paul dans un besoin urgent, lui a plongé un poignard dans le sein pour toute reconnaissance, les imbécilles se déchaîneront, on criera à l’atrocité, et l’ame de ce meurtrier sera pourtant bien plus grande que celle de son adversaire, puisque l’un en obligeant n’a sacrifié qu’à son orgueil, et que l’autre n’a pu tenir à voir le sien humilié ; et voilà donc l’ingratitude une belle action. Faibles mortels ! comme vous vous composez aveuglément des vices et des vertus ; et comme le plus léger examen met à l’instant les uns à la place des autres ; tu n’imagines pas, Juliette, l’invincible penchant que j’éprouvai toujours pour l’ingratitude ; elle est la vertu de mon cœur, et je me suis senti révolté, toutes les fois qu’on a voulu m’obliger ; je disais un jour à quelqu’un qui m’offrait ses services… Ah ! prenez garde que je ne vous prenne au mot, si vous ne voulez pas que je vous déteste. Cette espèce de charité, d’ailleurs, que vous