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Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/39

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il lui propose de se battre corps-à-corps. Qui es tu, lui demande fièrement le roi, pour que je t’accorde cette faveur ? Le chef des Mores, répond le guerrier, je suis las du sang que nous versons ; épargnons-le, Rodrigue, la vie des sujets d’un empire doit-elle être sacrifiée aux faibles intérêts de leurs maîtres ? Que les souverains se battent eux-mêmes, quand des discussions les séparent, et leurs querelles ne seront plus aussi longues ; prends du terrain, fier Espagnol, et viens mesurer ta lance à la mienne ; à celui des deux qui triomphera seront les fruits de la victoire… y consens-tu ? Je suis à toi, répond Rodrigue, j’aime bien mieux n’avoir à vaincre qu’un pareil adversaire, que de lutter plus long-tems contre ces flots innombrables de peuples. — Je ne te parais donc pas redoutable ? — Je ne vis jamais de plus faible ennemi. — Il est vrai que tu m’as déjà vaincu, Rodrigue ; mais tu n’es plus au jour de tes triomphes, tu ne languis plus au fond de ton palais dans le sein de tes indignes voluptés,