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Page:Saint-Point - L’Orbe pâle, 1911.djvu/50

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CE matin, j’ai regardé le bouquet pâle : gloire, amour, mort, si pâles. Dans ma chambre violée par le soleil, il imposait désharmonieusement son aspect lunaire. Trop de lune depuis trop de nuits est sur moi, autour de moi, en moi.

Le soleil n’a-t-il donc plus ses fleurs ? Pourquoi tout est-il blanc dans le jardin autour de ma maison ? Les germes lunaires ont tous éclos, leurs fleurs, ont tout envahi. La mer garde-t-elle donc tout le soleil ? La lune, depuis trop de nuits, triomphe.

Je me penche au balustre de la terrasse pour trouver l’introuvable, ce qui n’est point pâle.

Alors mes yeux s’élargissent, mes reins se cambrent. Sous ma fenêtre, ce matin, le soleil a épanoui de la couleur. Une ardeur troue la blancheur des myrtes, des marguerites et des ciguës. C’est plus qu’une couleur, c’est la couleur.

Un géranium rouge éclate et triomphe.