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Page:Sardou - La haine.djvu/64

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LA HAINE.

GIUGURTA.

Un mot encore ?… C’est bien mon palais, n’est-ce pas, qui brûle tout là-bas ! (Uberta se lève et attend la réponse avec anxiété.)

UGONE, après un coup d’œil de ce côté.

Lui-même.

ERCOLE, vivement.

Et notre sœur ?

GIUGURTA, de même.

Cordelia ?…

UGONE.

Votre sœur doit être avec toutes les femmes, à Sainte-Marie de la Neige ! (Uberta, rassurée, retombe assise.)

GIUGURTA, à Ugone les yeux dans ses yeux.

Puisses-tu dire vrai !… — Et seul de ta bande, tu ne seras pas pendu !… — Maintenant… (Il s’assied.) ta commission, va !

UGONE.

Au nom du capitaine Orso ; seigneur Giugurta, voici ce que je t’offre ! — La bataille a déjà duré tout un jour et toute une nuit !… Depuis que l’on se bat, de rue à rue, de porte à porte, il y a partout un grand amas de morts et de blessés… — (Mouvement d’Uberta qui redresse la tête.) Et il ne te convient pas sans doute plus qu’à nous que ces malheureux succombent faute de soins, ou soient privés de leur sépulture chrétienne !… (Uberta se lève.) Considère en outre que le soleil est brûlant, et que les morts oubliés se vengent !… — La peste est à Pise, elle est à Bologne… il ne tient qu’à nous qu’elle soit ici, demain, pour y balayer, comme il y a vingt ans, quatre-vingt mille personnes en trois mois ! — Enfin, c’est aujourd’hui le très-saint jour de la Nativité de Marie, et c’est un sacrilége que nous célébrions une telle fête en nous égorgeant… Le capitaine Orso te propose donc une trêve du jour entier… une trêve au profit des morts et des vivants, en l’honneur (Il se découvre.) de la très sainte Vierge,