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Page:Say - Œuvres diverses.djvu/172

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a plus d’une fois senti le besoin qu’on avait des règle sûres à cet égard. Presque toutes les questions qu’il avait à résoudre étaient compliquées d’art et d’utilité ; on voulait récompenser ce qui était ingénieux, mais sans donner une prime à ce qui était inutile. Souvent il fallait balancer les intérêts d’une industrie avec ceux d’une autre industrie, et les intérêts du producteur avec ceux du consommateur.

L’Économie industrielle est propre à éclairer les fabricants et le commerce sur leurs rapports avec l’administration, comme sur leurs rivalités réciproques. Démontrant avec la dernière évidence que les richesses peuvent être créées de toutes pièces, elle leur enseigne que les intérêts des uns ne sont pas en opposition avec les intérêts des autres, et que l’un ne perd pas nécessairement ce que l’autre gagne. Elle est propre à faciliter la tâche de l’administration qui fait entendre raison plus aisément à des intérêts plus éclairés. Des négociants auront-ils fait une fausse spéculation, auront-ils maladroitement placé une manufacture, ou multiplié sans mesure des marchandises sans emploi, ils n’accuseront pas le gouvernement de ne pas protéger leur industrie, et ne lui demanderont pas des remèdes qu’ils peuvent trouver en eux-mêmes.

L’Économie industrielle enseigne à chacun de nous à connaître le fort et le faible de sa position, à la comparer avec celle des autres ; à en changer quelquefois, mais avec prudence et à ne pas en prendre une mauvaise en la croyant meilleure.

Les entreprises mal conçues et mal conduites ne sont pas fatales à elles seules : elles nuisent à toutes les autres. Quel établissement est capable de soutenir la concurrence d’un autre qui se ruine ?

L’entrepreneur qui veut retirer ses frais de production, ne peut lutter contre celui qui a mal calculé les siens, ou qui, sur de fausses présomptions, consent à les perdre. Les idées justes sont utiles à tout le monde ; non pas seulement aux hommes dont on éclaire le jugement ; mais à tous ceux qui ont avec eux des rapports directs ou indirects, à leurs familles, à leurs correspondants.

Tandis que les moralistes chagrins reprochent inutilement aux hommes de n’écouter que leurs intérêts, montrons-leur en quoi consistent leurs intérêts bien entendus. Prouvons-leur que si, dans certains cas particuliers, des méchants ont tiré parti de l’injustice et du crime, cependant, au total, le bien dont on jouit le plus sûrement, le plus longtemps, et avec le plus de tranquillité, toutes choses d’ailleurs