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des capitaux à des conditions moins rigou- reuses. « Là où des fœneratores sont trop nombreux, écril-il, ils se font du tort à eux- mêmes et non aux agriculteurs ou aux autres industries. Partout où se rencontrent plusieurs vendeurs d’une même marchandise, leur bé- néfice s’amoindrit  ; leur bénéfice s’élèverait s’ils étaient moins nombreux  ; de même la multitude des préteurs rend ce commerce moins fructueux et en réduit les profits. Dans leur nombre, il s’en trouvera toujours un qui sera disposé à donner son argent à loyer à meilleur marché... Quand dans les villes hol- landaises n’existe qu’un seul de ces prêteurs qu’on appelle des Lombards, il absorbe à lui tout seul autant du revenu des particuliers que s’ils étaient dix concui’rents... S’ils se multipliaient, il s’en trouverait toujours un pour se contenter d’usures légères... Ainsi leur grand nombre ne nuirait pas à la chose publique et serait avantageux aux individus». (De Usuris, p. 224.)

On rencontre assurément chez quelques- uns des prédécesseurs de Saumaise, par exemple chez Dumoulin, plusieurs des argu- ments dont il se sert, mais cette perception des avantages de la concurrence en matière de commerce de banque fait honneur à sa clairvoyance et lui est personnelle.

E. Castelot.

Bibliographie.

Troplong invoque fréquemment l’autorité de Saumaise dans la préface du t. XIV de son Droit civil expliqué (pp. 240 et suivantes). Pour les détails de la controverse i laquelle Saumaise prit part, voir Laspeyres, Volkswirthschaftliclie Anschauungen der Niederlânder zur Zeit der Republik {Leipzig, 1863), pp. 256-270.

SAY Léon. Jean-Baptiste), né à Paris le 6 juin 1820, mort à Paris le 21 avril 189(5. Il était fils de M. Horace Say, économiste hono- rablement connu, un peu à la façon des éco- nomistes anglais, à la fois hommes d’affaires et théoriciens (V. dans le Dictionnaire, art. Horace Say), et petit- fils de Jean-Baptiste Say, le père de l’économie politique fran- çaise et l’auteur du meilleur Traité, du plus méthodique et du plus clair oîi l’on puisse encore aujourd’h\à apprendre l’économie po- litique.

Son origine le destinait tout naturellement à s’occuper de cette science et tout naturel- lement aussi à marcher dans la voie où s’étaient illustrés son grand-père et distingué son père, dans la voie de l’économie politique libérale. Son éducation, les relations de sa famille, le milieu où il vivait, agirent en- core dans le même sens  : M. Léon Say apprit de bonne heure à aimer et à pratiquer la liberté  ; enfin son mariage avec une petite


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fille de .M. Berlin l’aîné le fit entrer dans le milieu de politique libérale des Débats. Dès lors la vie de M. Léon Say était orientée  ; il serait un économiste, il ferait de la poli- tique, il écrirait des ouvrages, il prononcerait des discours, ayant sans cesse avec lui pour conseillère et pour guide la liberté.

M. Léon Say a joué dans notre pays un rôle considérable à la fois comme homme poli- tique et comme économiste et, incontesta- blement, la partie la plus durable de sa gloire, il l’a acquise en sa qualité d’homme d’état, i-aisonnant la politique de son temps, mais n’oubliant jamais les enseignements de la science économique et ne s’écartant jamais de ses principes établis et démontrés.

Nous ne pouvons ici parler longuement de sa carrière politique. En 1871, il futélu mem- bre de l’Assemblée nationale, à la fois par le département de la Seine et celui de Seine- et-Oise, il opta pour la Seine. Le 6 juin de la même année. M, Thiers l’appela à la préfec- ture de ce département, et moins de dix-huit mois après, mais quand déjà il avait eu le temps de rétablir les finances de la ville et de marquer son passage par des travaux de premier ordre, au ministère des finances ^7 décembre 1872). Il reparut à ce minis- tère six fois encore (31 mars 1875, cabinet Buffet  ; 10 avril 1876, cabinet Dufaure  ; 13 dé- cembre 1876, cabinetSimon  ; 13décembre 1877, cabinet Dufaure  ; 4 février 1879, cabinet Wad- dington  ; 30 janvier 1882, cabinet de Freyci- net), et le dirigea au total pendant six années. Adiré vrai, de 1872 à 1882, il fut le ministre des finances de la France  : pendant cette période, toute notre politique financière a été dirigée ouinfiuencée par lui. En 1876, il avait passé de la Chambre des députés au Sénat, élu par le département de Seine-et-Oise, qui le réélut une seconde fois en 1882. Puis, en 1889, voyant que le Sénat perdait de son action directrice sur les affaires du pays, juste en un temps où les anciens partis se désorganisaient et où les socialistes se mon- traient plus audacieux, il repassa du Sénat à la Chambre des députés, élu par l’arrondisse- ment de Pau (Basses-Pyrénées), qui le réélut en 1893.

Entre temps il avait été (avril 1880) nommé ambassadeur de France à Londres, puis, tout de suite après, porté (mai 1880) à la prési- dence du Sénat, qu’il quitta, en 1882, moins par convenance personnelle que par un vif sentiment du devoir, pour entrer dans le cabinet Freycinet.

Sa carrière scientifique n’avait été ni moins active ni moins brillante. En 1874, il avait été élu membre libre de l’Académie des sciences morales et politiques  ; en 1880, il


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