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Page:Say et Chailley-Bert - Nouveau dictionnaire d'économie politique, supplément.djvu/277

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SAY


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LÉON SAY


éc!iang(?a la situation Je membre libre pour celle de membre titulaire  ; en 1882, il était nommé membre de la Société nationale d’agriculture  ; et enfin, en 1886, après une vie vouée toute à la science et au culte des choses distinguées et nobles, il alla naturellement jircndre place à l’Académie française.

Userait trop long de prendre et d’analyser un à un les ouvrages de M. Léon Sav  : nous en donnons d’ailleurs plus loin laliste àpeu près complète. Et non seulement ce serait long, mais ce serait presque inutile  : M. Léon Say a fait, quand il l’a fallu et quand il l’a voulu, œuvre île professeur et d’érudit  ; mais surtout il a fait œuvre d’homme d’Ktat et de philosophe, de philosophe économiste, et dans tous ses ouvrages, quelque forme qu’ils aient prise  : livre, article, discours, confé- rence, et quelque objet qu’il ait aborde, finances, commerce, politique, questions so- ciales, on trouve un certain nombres d’idées directrices, toujours identiquesàelles-mèmes. Ce sont ces idées qu’il faudrait dégager.

A dire vrai, elles se réduisentà une seule  : la défense de la liberté. Liberté politique, liberté religieuse, liberté économique  ; sous toutes ses formes et dans toutes les circons- tances, c’est la liberté et l’esprit de liberté qu’il a défendu, avec les ressources d’une science sûre, d’un art infini et d’une abon- dante expérience, mais avec une ténacité et une conviction, qui donnent à cette vie en appa- rence si variée (de la présidence de la Société d’horticulture à celle de la Société d’économie politique) toute son unité.

Seulement, comme la liberté a beaucoup d’ennemis, comme durant cette période de 1871 à 1896, elle a rencontré les attaques, en politique, des néo-Jacobins, les radicaux, et, en économie politique, des protectionnistes, des interventionnistes et des socialistes, il a eu à la défendre contre des adversaires mul- tiples, et les divisions de son œuvre corres- pondent aux diverses catégories d’assaillants auxquels il a eu à faire face.

Nous ne parlerons ici que de ce qui inté- resse l’économie politique.

Son œuvre principale, à n’en pas douter, a été son œuvre financière (lois, budgets, dis- cours, ouvrages)  ; après cela, vient sa défense de la liberté commerciale (ligues, confé- rences, brochures, discours), et enfin ses rudes attaques contre le socialisme (rapports, discours et livres).

Voilà bien la triple division que l’on peut observer dans la variété infinie de son œuvre. Mais si l’on va plus au fond, on s’aperçoit que de même qu’il a toute sa vie combattu et évolué autour d’une idée centrale  : la liberté, avec ce qu’elle implique  : ordre.


clarté, prévoyance, etc., de même toute son œuvre se rattache à une question primordiale  : les finances. Ce sont elles qui dominent sa carrière d’homme d’État et de savant, et qui lui donnent, à lui, sa physionomie  ; quand plus tard, le biographe et l’historien auront à marquer sa place et son rang, ils 1<  ; défini- ront  : homme d’État et financier.

Tout d’abord, ses plus beaux discours sont des di-cours de budget  : ainsi ces discours admirables de 1882 (20 et 27 juillet) sur le bud  :.’et de 1883. Celle de toutes ses œ-uvres que l’on place le plus haut est son Rapport sur l’indemnité de guerre, tableau du genre le plus élevé qui, par l’allure générale, se place à côté du fameux Rapport au roi de Necker et, par la sûreté et l’érudition, le dépasse de beaucoup. Ses ouvrages didacti- ques les plus importants sont des livres qui se rapportent aux finances  : les Solutions démo- cratiques des impôts, et celui dont il corrigeait les dernières épreuves sur son lit de mort, les Finances, etc.

Mais il y a plus. Les questions les plus diffé- rentes se présentent à lui et sont abordées par lui comme problèmes financiers ouàl’occasion de problèmes financiers. Tout ce qu’il a fait enfaveurde la liberté commerciale, dès 1872 et surtout en 1879, en 1881, en i88n, en 1892 et en 1894, tant de discours, de conférences, de brochures, de ligues, d’associations, tout cela a vu le jour quand le gouvernement a proposé des impôts nouveaux, tantôt dans un calcul fiscal et tantôt dans un intérêt pro- tectionniste, soit sur les matières premières nécessairesà l’industrie, soit sur les céréales, soit enfin sur la plus grande partie des pro- duits fabriqués.

Et de même encore pour les questions sociales. Personne n’a plus vivement que lui combattu les socialistes, et personne n’en a été plus redouté, car il joignait à la science qui confond l’ignorance la répartie qui cingle la sottise  ; mais tandis que d’autres les atta- quaient à propos du dogme, lui prenait toujours texte d’un projet de loi, et ce projet ou cette proposition concernait les finances  : par exemple, en 1894, la proposition de M. Jaurès de faire de l’Etat le grand spécu- lateur sur les blés  ; en 1893, le projet d’impôt progressif sur les successions  ; en 1890, le projet général d’impôt sur le revenu. A cha- que fois, ses critiques débutaient par le côté financier, puis bientôt s’élevaient, passaient par-dessus la tête des ministres des finances et s’en allaient frapper en plein cœur le parti radical, protectionniste ou socialiste.

Dans les dernières années de sa vie, le so- cialisme menaçant devint certainement sa préoccupation dominante  ; ses études, ses lec-