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MITISME


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ANTISEMITISME


Anlisémilisme du vins siècle à la Réforme.

— depuis la Réforme jusqu’à la

Révolution française.

2. Antisémitisme moderne.

Antiséiiiilisme dans l’Europe orientale.

— dans F Europe occidentale.

3. Les variétés de l’antisémitisme  ; ses griefs.

4. Conclusions.

1. Historique.

Il ne peut èlre question ici de faire l’his- toire de l’antisémilisme car, à vrai dire, c’est l’histoire d’Israël qu’il faudrait entreprendre ; l’histoire d’Israël depuis le jour où il a cessé d’être une nation pour rire une tribu parmi les peuples. Dès ce jour, dès que les juifs eurent quitté la Palestine pour fonder des colonies en Asie Mineure, dans les Iles, en Egypte, en Cyrénaïque, cà Rome, en Espagne, dès cejour l’antisémitisme se manifesta. Nous allons voir rapidement les formes diverses qu’il a prises, et les causes qui l’ont engendré, depuis l’anti- quité jusqu’à la Révolution française, époque de l’émancipation des juifs.

Antisémitisme dans l’antiqidté. — Sans remonter au séjour des juifs en Égyple, ni même à l’histoire légendaire d’Aman, on voit, dès le iv^ siècle avant notre ère, en même temps que les colonies juives devien- nent florissantes, se développer l’antisémi- tisme. Cet antisémitisme — ou plutôt antiju- daïsme — était causé d’abord par la situation spéciale des juifs, qui entraient dans les cités non comme citoyens, mais comme privilégiés, formant partout des sortes de républiques reliées à Jérusalem par l’impôt spécial du didrachme qu’elles payaient au grand prêtre  ; ensuite, par les avantages que recueillaient les Juifs de leur situation, avantages matériels et considérables.

Très nombreux à Alexandrie, très puissants et très riches, ils suscitèrent à plusieurs reprises des émeutes, et la foule se rua contre ces détenteurs de richesse qui étaient des étrangers, ne prenant aucune part à la vie publique. La littérature anlijuive na- quit avec Manéthon, Chérémon, Lysimaque, Appion, Posidonius, et Appollonius Molon.

A Rome, les mêmes causes économiques se manifestèrent, et il s’y mêla des causes reli- gieuses. La religion juive était destructive de la religion romaine officielle, puisqu’elle ne pouvait l’accepter ; or le culte romain était le soutien de la République et de l’Empire, on le considérait comme le gardien et le pro- tecteur des institutions et des lois. La loi juive ne s’accommodant pas des rites romains, et étant aussi intolérante que la religion romaine, inquiéta les Romains, que l’esprit prosélytique des juifs irritait et effravail.


Ce furent des causes semblables qui provo- quèrent les persécutions contre les chrétiens.

Antisémitisme dans l’antiquité chrétienne, jusquà Constantin. — i :!ien que les pre- mières communautés chrétiennes soient sor- ties des communautés juives, et qu’elles aient profité des privilèges accordés aux juifs, l’hostilité réciproque des deux reli- gions ne tarda pas à se manifester. D’une part, les juifs, à cette époque où ils luttaient pour défendre leur nationalité expirante, attaquèrent les judéo-chrétiens qui se désin- téressaient des luttes contre Rome, d’autre part, l’Église en se constituant, en aspirant à l’universalité, tendit à se libérer des liens de la synagogue. On connaît l’opposition des tendances hellénistes et des tendances judaï- ques du christanisme naissant, tendances que Paul et Pierre symbolisent. L’Église chrétienne primitive devint antijuive, en ce sens qu’elle combattit les hérésies judaïsan- tes et la gnose juive. Avec le développement du dogme de la divinité de Jésus, les juifs furent de plus en plus considérés comme des déicides. On trouve déjà ce sentiment dans la Didacé, dansTEp/fre à Barnabe et dans les sept épîtres d’Ignace d’Antioche. Cette hostilité se produit dans les discussions que suscitèrent les juifs, ardents à combattre les jeunes dogmes chrétiens. Une partie de la littérature apolo- gétique est consacrée à combattre les exégètes talmudisles ; ainsi Le Dialogue avec Tryphon de Justin le Philosophe et l’altercation de Jaso7i et Papiscus, du Grec Ariston de Pella.

Avec l’expansion du christianisme, ces inimitiés, se précisèrent. Avec les progrès de la loi nouvelle, les juifs virent diminuer rinfluence spirituelle et morale qu’ils avaient conquise au déclin du monde antique ; mais, en meilleure situation au point de vue légal que les chrétiens, ils combattirent vivement l’Église naissante  : les controverses se multi- plièrent et, au milieu de ces combats, naquit un antijudaïsme théologique qui consis- tait à repousser comme mauvais tout ce qui venait d’Israël. Le De Adversus Judœos de Tertullien, VOctavius de Minutius Félix, le De CathoUcse Ecclesix unitate de Cyprien de Carthage, les Divinx Institutiones de Lac- tance, etc., répercutent cet antijudaïsme, purement théorique qui, jusqu’à Constantin, se confondit avec les efforts que faisait l’Église pour arriver à assurer son triomphe.

V antisémitisme depuis Conslantin jusqu’au wu" siècle. — Quand, sous Constantin, l’Église eut triomphé, elle hérita de Rome, de son exclusivisme, de son orgueil, et, disposant du pouvoir, elle devint persécutrice, à l’épo- que où le judaïsme agonisait en Palestine,, et où les hérésies judaïsantes proprement


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