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Page:Schœlcher - Abolition de l'esclavage, 1840.djvu/121

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on nous le veut présenter comme un fait providentiel, une des phases de la civilisation, et l’on nous dit ensuite que critiquer l’esclavage, prôné par Aristote, toléré par Jésus-Christ, c’est critiquer à-la-fois la Providence, la civilisation, Aristote et Jésus-Christ.

N’est-ce pas misérable ?

Il est curieux de les entendre, ces profonds savants qui veulent systématiser la servitude des Noirs, parce qu’ils ont découvert que l’ilotisme remplaça autrefois le massacre des vaincus. M. Mauguin s’est pourtant chargé d’une telle entreprise. Ne voit-il pas que le régime antique ayant été le fruit de la guerre, il n’y a nulle parité à établir avec le régime colonial, fruit d’un infâme commerce ? Mais encore, où nous mènerait une telle façon d’argumenter ? Si vous excusez la servitude moderne par la servitude antique il vous faudra forcément excuser toute cruauté des propriétaires actuels par les cruautés des propriétaires anciens. Si un colon jette dans un étang, pour y servir de nourriture à ses murènes, un Noir qui lui aura cassé un gobelet ; si un propriétaire fait crucifier un Nègre qui