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Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/24

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Martinique : d’où il n’est sans doute pas exagéré de conclure qu’elles ne sont point en vigueur. « Il ne manque rien à la loi, ajoute M. Dufau, que ce qui fait qu’elle est exécutée. » — Mais voici quelque chose de plus extraordinaire encore, et dont l’immoralité nous effraie : c’est que le fonctionnaire intègre qui voudrait faire son devoir ne le peut même pas. Sans appui parmi ses collègues, demandant en vain à la justice le secours d’une force qu’elle n’a plus, hué et menacé par les blancs jusque sur les places publiques, il est bientôt obligé de résigner ses fonctions, ou de se soumettre, magistrat prévaricateur, à l’usage qui prévaut sur la loi. — Jamais les hauts barons de la féodalité, entourés de leurs vassaux, n’ont professé un mépris plus complet de la loi commune, que ne le font les blancs dans les colonies. — Dernièrement encore, la presse a signalé l’étrange décision du contre-amiral Dupotet, qui condamne, après avoir pris l’avis du conseil-privé, M. Boitel, secrétaire-archiviste de la colonie, à quitter les Antilles, pour avoir reçu à sa table des hommes de couleur libres. Et l’on sait qu’effectivement cet ancien fonctionnaire, malgré toute la fermeté de son caractère, a été obligé de fuir, après avoir couru les plus grands dangers au milieu des possesseurs d’hommes[1].

  1. Séjour d’un fonctionnaire dans les Colonies, par M. C. Boitel.