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Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/76

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Puis un peu plus loin, il leur accorde l’instinct du juste et de l’injuste, parce qu’ils ne se plaignent jamais quand ils reçoivent les coups qu’ils ont mérités. — Il y a là évidemment deux idées qui se combattent, et personne n’osera soutenir, je pense, qu’un animal puisse être bon juge. À la vérité, M. F. P. ne parle que d’instinct, et en cela il est conséquent, puisqu’il veut parler de bêtes. Tout animal, depuis le plus malin jusqu’au plus stupide, aura, par exemple, l’instinct de fuir les coups ou de s’en défendre, mérités ou non ; c’est l’instinct de la douleur, instinct inné, inhérent à une certaine disposition d’organes à laquelle la nature a pourvu pour la conservation des ses ouvrages, et dont le principal caractère est de n’avoir d’effet qu’au moment où il en est besoin. Mais je le demande, qu’est-ce que l’instinct du juste et de l’injuste ? Cette idée du juste pour l’esclave que vous frappez, suppose l’idée d’un droit ; et, sans doute, vous ne prétendez pas que ce soit la nature qui ait formé ce nègre au respect du droit que vous vous arrogez de le battre, non plus qu’au sentiment des condition qui lui font trouver juste votre rigueur : ce n’est donc pas un instinct qui lui inspire sa résignation ; l’instinct le pousserait à la fuite, ou à une subite vengeance ; mais sa raison modère ce premier mouvement : c’est précisément en dominant son instinct, qu’elle lui rend