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Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/77

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perceptible la position où il peut être relativement à ce qui est juste et injuste selon la société ; il saisit des rapports et constate une différence qui le provoque à la plainte ou le décide à se taire. — Il y a là une opération de l’esprit qui n’appartient qu’au cerveau de l’homme ; une opération qui suppose la faculté de comparer. — Eh bien ! cette faculté de comparer est la seule qui nous élève au-dessus des autres animaux[1] ; c’est par-là qu’on est homme ; c’est par-là qu’on juge du bien et du mieux, du plus et du moins, du bon et du mauvais. — Or, quoi

  1. L’homme n’a pas le pouvoir de créer des idées ; il peut combiner un projet, mais c’est avec les idées qu’il a reçues ou qu’il reçoit de la source inconnue de toutes les idées. Il n’est pas maître de ne pas les recevoir, mais il l’est de les garder ou de les repousser ; et voilà précisément ce qui le distingue des autres animaux ; voilà ce qui constitue de qu’on appelle improprement son libre arbitre ; les animaux ne l’ont pas, puisqu’ils ne peuvent adopter ni rejeter les idées qu’ils reçoivent, faute de pouvoir en peser le bien ou le mal. Cette proposition n’est pas absolue, sans doute, car un chien et un chat se cachent pour mal faire ; les singes placent des sentinelles pour aller à la maraude ; les renards s’associent pour chasser le lapin, et des loups se rassemblent pour cerner les chevaux dont ils veulent s’emparer. Mais un tel emploi de facultés raisonnables est assez rare et assez restreint pour qu’on puisse le nier en thèse générale, surtout en remarquant qu’elles ne s’exercent jamais que pour satisfaire le besoin de se nourrir.
    F. Milleroux.