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Page:Schœlcher - Le procès de Marie-Galante, 1851.djvu/53

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plice de la prétendue insurrection. Suivant le procureur général, « c’est lui et ses deux acolytes (style Rabou) qui faisaient croire aux habitants de Marie-Galante que la mer n’ayant pas de maîtres, la terre ne devait pas en avoir davantage. » Malgré cette accusation de communisme, qui manque rarement son effet aux colonies comme dans la métropole, ces prévenus, nous le répétons, ont été reconnus innocents. Nous ne discuterons pas la prétendue doctrine du partage des terres, dont on voulait les faire disciples ; il n’en a pas été question une seule fois dans le procès. Nous avons prouvé autre part que ces bruits, aussi absurdes que coupables, ont été répandus par ceux-là seuls qui s’en font aujourd’hui une arme contre nous[1].

Nous avons dit ce que nous voulions sur le véritable caractère des événements et du procès de Marie-Galante, c’est à l’opinion publique à juger en dernier ressort. Les faits appartiennent à l’histoire. Nous ferons seulement une dernière réflexion : Les soixante neuf accusés avaient tous des antécédents irréprochables, le fait a été proclamé par Me Lignières, avocat blanc. « Quels étaient donc ces hommes ? dit-il ; vous les connaissez, vous les avez tous sur ces bancs. À l’exception d’Hyppolite, qui a subi en police correctionnelle une légère condamnation, et d’un autre aussi condamné en simple police, ils n’ont rien à se reprocher dans leur passé. Plusieurs d’entre eux ont obtenu dans cette enceinte d’honorables attestations. »

Vingt-huit des accusés ont été absous, quarante et un condamnés. Nous ne pouvons nous prononcer sur ce verdict ; le respect que l’on doit à la chose jugée nous ferme la bouche. En présence de l’arrêt qui partage entre les quarante et un condamnés trente-sept années de prison, cent-cinq années de réclusion, soixante années de galères, outre une peine de travaux forcés à perpétuité, un seul devoir nous reste à remplir, c’est celui de dire comment furent composées les assises qui ont rendu un jugement aussi rigoureux.


  1. Voir la Vérité aux cultivateurs et ouvriers de la Martinique, pages 184 et suivantes.