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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/103

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de la vie présente. Cette objection n’a aucune valeur aux yeux de Schleiermacher qui, fidèle à son idéalisme, rejette toujours comme indigne de la religion plus encore que de la morale toute pression exercée par des promesses de félicité ou des menaces de châtiment.

Nous pouvons constater la même continuité, avec la modification d’un assagissement dû à l’expérience, dans ses idées sur l’Église. Il conçoit toujours, ainsi qu’il faisait dans les Discours, l’Église comme une libre société de croyants. Il tient cependant davantage compte des nécessités d’une organisation, et en particulier d’une répartition dans l’activité nécessaire au maintien de la vie dans l’Église, entre les membres plus actifs, le clergé, et les membres plus passifs, les laïques. Il continue à penser d’ailleurs que les uns comme les autres doivent contribuer par une participation active à entretenir cette vie.

Tous les croyants y sont aptes par leur participation à la vie en Christ, effet d’une conversion dans laquelle Schleiermacher voit, conformément à la tradition chrétienne, une nouvelle naissance, § 107, II, 155-158.

Ce qu’il y a de plus christianisé dans sa conception de l’Église, et qui confère à celle-ci une valeur de haute mysticité, c’est que, tenant compte de mainte parole du Christ après sa résurrection, il voit, dans la communion des croyants qu’elle réalise, l’incarnation même de la troisième Personne de la Trinité, du Saint-Esprit, §§ 120-125, II, 253-292.

Sa conception des rapports des Églises entre elles et avec ceux qui n’en font pas partie, avec les hérétiques mêmes, est aussi tolérante que possible, animée du plus large et généreux amour de toute l’humanité, de toute l’humanité véritable, celle qui, à travers ses erreurs et ses fautes, aspire à l’idéal d’une vie spirituelle harmonieuse. Ni dans le temps, ni dans l’espace, ni sur le plan des dispositions intérieures, cette humanité n’a pu et ne peut en fait communier tout entière dans la foi chrétienne. C’est dans l’esprit du généreux libéralisme qui l’anime que Schleiermacher traite le problème scabreux pour lui du choix des élus et de la prédestination, §§ 117-120, II, 233-264.

La question de l’unité et de la pluralité de l’Église chrétienne, si longuement discutée dans les Discours, revient sous la forme de la distinction entre l’Église invisible, une,