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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/16

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rale. Le jeune homme lui répondit sans doute comme il fera onze ans plus tard au pasteur Sack, son préposé et protecteur d’alors à Berlin, qui lui fait la même observation après avoir pris connaissance des Discours. Il déclare ne pas voir de profession plus belle, plus noble, et qui réponde aussi bien à sa vocation intime, que celle qui ne lui assure qu’une situation terrestre si infime (Correspondance, III, 284-5). Tel restera toujours, à travers les hésitations et les scrupules qui ont souvent agité sa jeunesse, son sentiment foncier.

Il gagne sa cause auprès de son père comme il la gagnera auprès de Sack. Ses parents lui accordent deux années de théologie à l’Université de Halle ; il étudie là du printemps 1787 au printemps 1789, de l’âge de 19 à 21 ans.

Le milieu qu’il trouve à Halle est celui du protestantisme réformé, mais orienté ici vers un rationalisme modéré. Le jeune homme n’a d’ailleurs pas éprouvé là l’influence pénétrante d’un professeur qui devient initiateur. Ses maîtres à penser ont été les philosophes qu’il connaît et va connaître par l’étude directe de leurs œuvres.

Le jeune homme commence dès cette époque à jeter sur le papier quelques-unes de ses idées, essais qui ne seront publiés que longtemps après sa mort ; ce sont d’abord, au cours de ces années d’Université, des réflexions critiques sur la notion kantienne du Souverain Bien, puis dans les années qui suivent, sur la Liberté et autres problèmes moraux, et en 1792 ou 1794 sur Spinoza (Cf. Dilthey, Denkmale, p. 1-69).

Cependant, l’étudiant ne vit pas entièrement confiné dans ses études, et dans sa méditation solitaire sur les questions vitales sous leur forme la plus hautement abstraite ; le moraliste en lui sera toujours attentif aux caractères que ces problèmes présentent dans la vie elle-même, dans les existences personnelles et les relations inter-individuelles. À Halle, il sait mettre à profit les aperçus que lui ouvre sur la société un jeune noble suédois, Gustave de Brinkmann, homme du monde et poète mondain, que lie avec lui une amitié confiante de part et d’autre, et qui durera : c’est à lui qu’il dédiera en 1806 la seconde, et en 1821 la troisième édition de ses Discours.

De mai 1789 à avril 1790, il vit à Drossen, petite localité