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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/20

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1802, il va vivre une première période berlinoise, toujours fidèle dans l’accomplissement de sa fonction, travaillant toujours à développer sa culture littéraire et philosophique, en liaison étroite avec le romantisme naissant, auquel il donne presque autant qu’il en reçoit.

Les années 1797 à 1802 sont celles où le premier romantisme allemand se constitue en école et statue son programme. Cette double activité a son siège moitié à Iéna, la petite ville universitaire qui partage alors avec Weimar la dignité de capitale intellectuelle de la Saxe, moitié à Berlin.

Dans la capitale prussienne l’apôtre de ce romantisme, Fr. Schlegel, amené là par les circonstances, a vécu d’août 1797 à août 1799. C’est là qu’il publie de 1798 à 1800 la revue Athenäum, évangile de la nouvelle religion. Tieck, qui est né à Berlin s’y trouve dans ces mêmes années, et entretient le souvenir de son jeune ami Wackenroder, mort déjà en février 1798, après avoir modulé d’une voix très pure quelques-uns des thèmes les plus persuasifs de la musique de l’avenir. A.-W. Schlegel y fait des séjours. À l’instigation de Fr. Schlegel, Fichte y vient en 1799, quand la polémique au sujet de l’athéisme dont il est accusé l’amène à quitter Iéna.

Ces hommes, qui avoisinent alors la trentaine, et dont une certaine communion intellectuelle va créer l’atmosphère romantique, se voient souvent. Ils se rencontrent soit chez l’un ou l’autre, soit dans les salons de juives émancipées, d’esprit éclairé et indépendant, en particulier Henriette Herz, Rahel Levin, Dorothée Veit née Mendelssohn. À ces relations directes s’ajoutent celles qu’entretient une correspondance nourrie avec les amis groupés à Iéna ou dans ses environs, A.-W. Schlegel, Novalis, Schelling, incidemment Fichte, et le courant créé par la lecture des ouvrages passionnément commentés entre eux qu’ils publient les uns et les autres. Ainsi se forme une véritable école, au sens littéraire et philosophique du mot, école dans laquelle chacun d’ailleurs garde toute son originalité, où les désaccords sont nombreux et les dissentiments parfois violents, où se produit cependant une sorte de symbiose intellectuelle, et naît une espèce de pensée collective, dans l’activité de laquelle l’afflux, les oppositions et les combinaisons de tant d’idées avivent,