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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/211

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TROISIÈME DISCOURS

SUR LA CULTURE DE L’ESPRIT EN VUE DE LA RELIGION[1]

[134] Ce que j’ai moi-même reconnu spontanément comme un trait fondamental de la religion, la tendance à vouloir convertir des incroyants et faire d’eux des prosélytes[2], n’est pas ce qui me pousse à présent à vous parler aussi de l’éducation à donner à l’homme en vue de favoriser en lui cette très haute disposition, et de ce qui conditionne cette dernière. Pour atteindre ce but, la religion ne connaît qu’un moyen : s’exprimer et se communiquer librement.

Quand elle se meut avec toute la force qui lui est propre, quand elle entraîne avec elle, dans le courant de ce mouvement, et met au service de ce dernier toutes les facultés de son esprit, elle s’attend aussi à pénétrer jusqu’au plus intime de tout individu qui [135] respire son atmosphère, elle s’attend à ce que tout ce qui en lui est de même nature qu’elle subisse son influence[3], parvienne, porté par le même élan, à la conscience de son existence, et réjouisse, par la réponse d’une intonation apparentée, celui qui a lancé cet appel, et dont l’oreille est avide de cet écho.

C’est ainsi seulement, par les manifestations naturelles de sa propre vie, qu’elle veut faire naître ce qui lui est semblable, et là où elle n’y réussit pas, elle dédaigne fièrement toute incitation étrangère, tout procédé violent, tranquillisée par la conviction que l’heure n’est pas encore

  1. Ueber die Bildung zur Religion.
  2. Cf. p. 49 et 187.
  3. Version de B. A disait plus abstraitement : que chaque partie homogène soit touchée.