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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/283

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battre. Si en effet vous portez à présent, comme je l’espère, un jugement plus favorable sur la religion en général, si vous reconnaissez qu’elle a pour base une disposition particulière et noble dans l’être humain, laquelle par suite, partout où elle apparaît, doit être cultivée et prendre forme : s’il en est ainsi, il ne peut pas vous répugner de la considérer sous les aspects sous lesquels elle s’est déjà réellement manifestée, et vous devez juger ces manifestations d’autant plus dignes de votre attention que ce qu’il y a de particulier et de distinctif dans la religion y a plus nettement pris figure.

Mais peut-être, refusant de reconnaître cette raison, allez-vous déverser sur les religions particulières tous les vieux reproches que vous aviez l’habitude de faire à la religion en général, et soutenir que c’est précisément dans ce que vous appelez le positif en religion que doit résider ce qui toujours de nouveau occasionne et justifie, ces reproches. Vous [245] nierez que ce puissent être là des manifestations de la vraie religion. Vous me rendrez attentif au fait que toutes, sans distinction, sont pleines de ce qui, d’après ma propre déclaration, n’est pas de la religion, et que par conséquent un principe de corruption doit être profondément inhérent à leur constitution ; vous me rappellerez que chacune d’elles se proclame la seule vraie, et professe que c’est précisément ce qu’elle a de particulier qui constitue sa supériorité suprême ; vous me rappellerez comment elles se distinguent les unes des autres précisément par ce qui, considéré par elles comme chose essentielle, est-ce que chacune devrait autant que possible éliminer d’elle-même ; comment, d’une façon tout à fait contraire à la nature de la vraie religion, elles démontrent, réfutent et discutent, soit avec les armes de l’art et de la raison, soit avec d’autres encore plus étrangères et indignes ; vous ajouterez que, précisément dans la mesure où vous estimez à présent la religion, et la reconnaissez comme chose importante, il devrait être d’un vif intérêt pour vous que lui soit accordée partout la plus grande liberté de se développer en tous sens et des façons les plus variées, et que vous devriez par conséquent détester d’autant plus vivement les formes déterminées de la religion, qui retiennent tous ceux qui y adhèrent atta-