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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/144

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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


un homme raisonnable et discret ; bien entendu, il faut que les deux femmes soient de véritables amies, ainsi que nous deux. Mais l’une ne doit pas être plus honteuse et plus craintive que l’autre. Et ceci est encore ta faute, ma chère Pauline.

— C’est bien heureux que ton prince ne soit pas là, ma chère, pour écouter notre conversation. Je ne saurais pas comment me défendre de lui. Ce que tu me dis me ronge d’un feu inférieur. Vois toi-même combien je suis échauffée et tremblante.

En disant cela, je me tournai vers elle et je me plaçai de façon à ce que, si quelqu’un regardait par le trou de la serrure, rien ne lui pût échapper. Si le prince était là, c’était le moment d’entrer, et il entra !

Ainsi qu’un homme du monde parfait et plein d’expérience, il comprit immédiatement que toute parole était inutile, qu’il devait vaincre avant tout et qu’il y aurait après assez de temps pour les explications. À la conduite de Roudolphine, je vis que tout était arrangé d’avance. Je voulais me cacher sous les couvertures, Roudolphine me les arracha ; je voulais pleurer, elle m’étouffait, en riant, de baisers. Et comme j’attendais enfin la réalisation immédiate de mon plus long désir, je dus patienter encore. J’avais compté sans la jalousie de Roudolphine. Malgré la nécessité de me prendre pour complice, malgré la crainte de voir son plan échouer au dernier instant, elle ne m’accordait pas les prémices des baisers princiers. Avec une ruse que je lui enviai, mais que je n’osais pas démasquer sans sortir de mon rôle, elle