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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/186

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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


chaud, j’enlevai le fichu de soie qui me couvrait la nuque et la gorge. Arpard avait le spectacle de mes deux collines de lait. Au commencement, il ne les regardait que du coin des yeux ; quand il vit que je lui permettais ce plaisir, il se pencha un peu vers moi et ses yeux y restaient fixés. Il soupirait, sa voix tremblait. En lui tendant un verre de café glacé, je lui frôlai la main et nos doigts s’unirent une seconde. Je sentais venir l’instant de ma défaite et je me défendais faiblement. Un petit frisson parcourait mon corps, je devins rêveuse, notre conversation tomba brusquement. Je me renversai sur le canapé, mes yeux étaient clos, mon esprit se troublait et je pensais m’évanouir. J’avais dû changer de couleur, car Arpard me demanda, inquiet, si je me trouvais mal. Je me ressaisis et le remerciai d’une poignée de main que nous prolongeâmes. Je lui abandonnai ma main gauche, il la couvrit de baisers. Son visage était rouge. Je croyais que tous les boutons de son habit allaient sauter, tant sa poitrine se gonflait.

Est-ce que ces préliminaires devaient durer encore longtemps ? Il était beaucoup trop timide pour profiter de ses avantages, il ne les remarquait même pas. Un roué n’aurait pas manqué d’en profiter ; mais un roué m’aurait-il amenée à cet état ? J’aurais tout employé pour lui cacher mes sentiments.

La situation devenait pénible. Je rappelai à Arpard que son oncle lui avait recommandé de me montrer la ville. Je sonnai et je commandai d’aller chercher un fiacre.