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LE DISPERSION

tades que l’auteur aurait été tout surpris de voir prendre au sérieux[1] ; l’autre, et c’est Verhaeren, imagine que l’auteur de Sagesse n’a pu faire que quelque chose de simple, d’ingénu, de naïf, de bénin, « c’est-à-dire un art contraire à celui du Parnasse[2] ». C’est déjà mieux, mais c’est insuffisant. Nous avons vu que le bâton sur lequel Verlaine appuie sa marche hésitante, est une canne à dard : cherchons la pointe cachée dans son Art Poétique :


                             I

De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l’Impair
Plus vague et plus soluble dans l’air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.

                            II

Il faut aussi que tu n’ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise ;
Rien de plus cher que la chanson grise
Où l’Indécis au Précis se joint.

                            VI

Prends l’éloquence et tords-lui le cou !
Tu feras bien, en train d’énergie,
De rendre un peu la Rime assagie.
Si l’on n’y veille, elle ira jusqu’où ?

                           VII

Ô qui dira les torts de la Rime ?
Quel enfant sourd ou quel nègre fou
Nous a forgé ce bijou d’un sou,
Qui sonne creux et faux sous la lime ?

                           VIII

De la musique encore et toujours !…

                            IX

Que ton vers soit la bonne aventure
Éparse au vent crispé du matin,
Qui va fleurant la menthe et le thym…
Et tout le reste est littérature[3] !


Il n’y a pas là un seul mot qui ne soit une attaque, ou contre Leconte de Lisle, ou contre ses disciples : briser leurs rythmes,

  1. Delahaye, Verlaine, p. 381.
  2. Impressions, p. 71.
  3. Œuvres, I, 311-312.