Page:Souriau - Histoire du Parnasse, 1929.djvu/508

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
444
HISTOIRE DU PARNASSE

de poésie véritable, dit M. Maurras, dans une épigramme de Frédéric Plessis que dans tous les Trophées. Pour ma part, je donnerais bien presque toute l’énorme production du Parnasse pour un quatrain comme celui-ci, de La Lampe d’Argile, dont on adorera la douce bienveillance et l’antique parfum :


N’accuse pas la mer de ton sort misérable,
Naufragé ! mais plutôt les vents injurieux :
Car ils t’ont fait périr, et le flot secourable
T’a roulé doucement au tombeau des aïeux[1]. »


Catulle Mendès est tout aussi respectueux de ce talent : « je crois bien que M. Frédéric Plessis est un des artistes les plus parfaits de notre époque, de toutes les époques[2] ».

Dans la nouvelle Pléiade, qui veut être une école savante, Plessis représente, avec L. Ménard, la vaste culture et l’érudition véritable. Ce docteur en droit est élève de l’École des Hautes Etudes, disciple d’Eugène Benoist. Les Parnassiens admirent cet humaniste. Pendant la longue absence de Louis Ménard, il représente à leurs yeux l’hellénisme[3]. Et sans doute il sait du grec autant qu’homme de France ; mais c’est d’abord un latiniste, un latin, surtout un maître de latin. C’est un professeur de professeurs ; maître de conférences à Poitiers, il complète l’érudition de son titulaire ; Hild disait loyalement : — c’est lui qui m’a révélé la science moderne. — Comme critique scientifique, Plessis est en effet de premier ordre ; il y a dans son histoire de la Poésie Latine un modèle de discussion serrée, pressante, sur le lieu de naissance de Properce ; il pense que le poète latin est né sur le mont Subiaco, à Assise, ou tout auprès, à cause des nombreuses inscriptions relatives aux Propertii, trouvées aux environs d’Assise, tandis que l’érudit Urbini penche pour Spello : « G. Urbini parle avec plus d’esprit que de sérieux quand il objecte que l’on a trouvé aussi à Rome, et même à Nîmes, des inscriptions où se lit le nom de Propertius, et qu’il demande si l’on va dire pour cela que Properce est né à Nîmes ou à Rome ? Non, on ne le dira pas, attendu que nous savons par ses vers qu’il est né en Ombrie, et dans quelle région de l’Ombrie ; que cette région est bien celle où se trouve Assise ; et comme Assise et les environs nous

  1. Barbarie et Poésie, p. 10.
  2. Rapport, p. 148 ; cf. Le Goffic, L’Âme Bretonne, III, 183.
  3. Mendès, Rapport, p. 148. Cf. Thérive, p. 60-72, 89, sqq.